mercredi 29 avril 2020

Comparaison

Dès le début de l'épidémie en France une habitude de comparaison avec les voisins s'est mise en place. Combien de contaminés, combien de morts ? Les chiffres tombent, bruts, quotidiennement. Il aura fallu à peu près un mois de contamination pour que les états commencent à se dire que la comparaison avec la Chine était truquée. Plus le temps passe, plus j'ai l'impression qu'on s'amuse à comparer des choux avec des carottes.

On a vécu l'expérience avec la France, les chiffres on peut leur faire dire ce qu'on veut. Il a fallu plusieurs semaines avant d'annoncer que le nombre de morts du Covid-19 était largement sous évalué puisque seuls les décès en hôpital étaient comptés. En quelques jours le nombre de morts a augmenté en rattrapant les décomptes issus des EHPAD. Les morts à domicile ne sont pas pris en compte. Pour les autres pays, il y a de fortes chances que ces disparités dans les modes de comptage soient aussi présentes (par exemple le Royaume-Uni vient juste d'ajouter le nombre des décès en maison de retraites à leur total).

Pour ne pas aider à la comparaison, les chiffres annoncés sont en nombre de malades ou en nombre de morts. Pas de proportionnalité par rapport au nombre d'habitants donc impossible d'avoir une idée de l'impact de la maladie dans un pays. Encore plus difficile d'avoir une comparaison possible avec nos voisins.

Dans cette foire à la comparaison, une nouvelle phase va s'ouvrir, la comparaison entre départements. Tous les jours Jérôme Salomon va enfiler son costume d'Alain Gillot-Pétré et donner sa météo du confinement. Je ne comprends pas vraiment l'intérêt de l'exercice à part monter une nouvelle fois les Français entre eux. Le gouvernement et ses parlementaires nous ont habitué à l'exercice : les gilets jaunes contre la "majorité silencieuse", la réforme de la SNCF et dernièrement la réforme des retraites avec l'opposition entre le régime général et les régimes propres à certaines branches. A partir de ce jeudi nous assisterons à une nouvelle opposition entre les Français à fort risque de contamination et les autres, dans l'optique de préparer ce que j'appelle un "déconfinement universel", tout aussi universel que le futur régime des retraites souhaités par LREM.

Le 11 mai, nous aurons un déconfinement universel mais différencié selon les départements. Cette météo montrera tous les jours que les départements les moins touchés (les moins peuplés ?) pourront se déplacer et reprendre une vie normale alors que les autres devront attendre au mieux début juin. Si on sait déjà que la nouvelle phase arrivera dans un mois, à quoi bon cette météo quotidienne ?

Un indicateur n'a d'intérêt que si on lui donne un sens et s'il répond à un objectif. La comparaison pour la comparaison, ça ne sert souvent à rien sauf à satisfaire les désirs de managers hors sol, comme semble l'être notre Président manager en chef de la startup nation.

Contretemps

Zone rouge du déconfinement au 28/04
Quand on se lance dans un journal de confinement, il y a des passages obligés. Le début du confinement, le moral, les réactions aux déclarations officielles (surtout si elles font l'objet d'un teasing sur plusieurs jours). Je n'attendais pas grand chose du passage du Premier Ministre devant les députés. Il nous avait déjà préparé au 11 mai date de début de la phase suivante et non du déconfinement. Le seul intérêt de ce discours est donc de savoir ce qui se cache derrière cette première phase exactement et quels sont les contretemps qu'on va subir.

Premier contretemps pour les parents qui avaient en tête l'idée de renvoyer les enfants et surtout les adolescents en cours. Il y a une semaine, le ministre Blanquer annonçait le retour en classe le 11 mai pour les CP et CM2, le 18 mai pour les 6ème et 3ème puis les Première et Terminale afin d'être pleinement opérationnel début juin. Une semaine plus tard, Edouard Philippe nous apprend que le 11 mai sera l'ouverture des crèches, écoles maternelles et primaires avec des groupes de 15 élèves maximum (10 enfants pour les groupes de crèche), le 18 mai sera la rentrée des 6ème et 5ème, les autres classes du collèges attendront fin mai. Les lycéens ne retrouveront le lycée que début juin. Il me semblait qu'au lycée les cours s'arrêtaient assez tôt en juin à cause des épreuves du bac. Est-ce que ça signifie que leur rentrée ne servira qu'à se dire au revoir ?
Pour la crèche de Grande Fille, peu de chance qu'elle fasse partie des 10 heureux élus parmi la grosse trentaine de moyens et grands réunis.

Deuxième contretemps pour tous ceux qui pensaient pouvoir sortir légalement de chez eux. Le Président de la République avait annoncé une solution régionalisée avant de se rétracter le lendemain. Revoilà le déonfinement régionalisé. A partir de jeudi, nous aurons donc le droit à une météo du Covid en France pour savoir où l'on peut sortir (zone verte) et où l'on doit se confiner (zone rouge). Le Premier Ministre est clair, "si les indicateurs ne sont pas au rendez-vous, nous ne déconfinerons pas le 11 mai". Gros stop adressé au déconfinement ! La phase suivante pour tous ceux qui seront privés de déconfinement est prévue au 2 juin ! Autant dire que les Franciliens et tous les habitants du Nord et de l'Est ne sont pas prêts de gouter au retour à la normale. Ce sera toujours plus dur pour les familles avec enfants puisque si les écoles ouvriront au ralenti, peu de chance de retrouver les squares et aires de jeux pour les enfants toujours privés d'école ou de crèche.

Troisième contretemps sportif, les championnats professionnels de foot et de rugby sont terminés. Au moins les joueurs ne devront pas craindre une reprise pour jouer les matchs couperets de fin de saison en manque de forme physique. En revanche grosse interrogation sur les clubs qui espéraient monter d'un échelon ou ceux qui espéraient bien ne pas faire le chemin inverse. Le Racing Club de Lens et sa deuxième place actuelle en Ligue 2 va-t-il retrouver l'élite alors qu'il n'a qu'un point d'avance sur Ajaccio ?  A contrario, Toulouse va-t-il sauver sa place alors que sa relégation était presque admise par tous ? Et pour les places européennes, l'OM va-t-il retrouver la Ligue des Champions ? Pour tous ces clubs et leurs supporters, les annonces de ce mardi ajoutent du flou au flou. Le seul point rassurant, la loi du marché n'aura pas gagné et les championnats ne se finiront pas dans une ambiance morbide de successions de matchs à huis clos.

Beaucoup de contretemps mais quelques bonnes nouvelles :l'application StopCovid n'est plus d'actualité, on devrait pouvoir arrêter de sortir avec notre attestation, les bibliothèques pourront rouvrir ainsi que de nombreux magasins. J'espère juste que ces bonnes nouvelles le seront réellement pour tout le monde et pas uniquement pour la déjà enviée zone verte.

En attendant, je vais continuer de chanter que "je veux vivre en dehors de tout ça"

lundi 27 avril 2020

Concilier

Seuls masques acceptés par les enfants
Le 13 avril le Président de la République a annoncé la réouverture dès le 11 mai des crèches, des écoles, des collèges et des lycées, contre l'avis du Conseil scientifique. Une fois la parole présidentielle descendue, reste aux différentes équipes la charge de l'intendance. C'est au niveau local (municipal, départemental et régional) et au niveau des établissements de réaliser la lourde tâche de concilier disponibilité des équipes encadrantes, responsabilité sanitaire et attente des parents. Difficile équation à triple inconnue.

Prenons l'exemple de la crèche de Grande Fille. Combien d'employés pourront être présents pour s'occuper des enfants ? Trois niveaux d'environ 15 enfants chacun. Environ 3 adultes par niveaux, sans compter le personnel moins visible des parents en cuisine par exemple. En tant normal, les effectifs sont si serrés que le moindre congé maladie un peu trop long désorganise tout l'établissement. Pour qu'un retour à la normale soit possible, il leur faut donc s'assurer de la disponibilité de toutes et tous. Il faut que tous les employés puissent prendre les transports en commun (sans avoir peur de la promiscuité). Il faut qu'ils aient un mode de garde pour leurs propres enfants, les classes des écoles, collèges et lycées ouvrant au fil des semaines sur les 3 prochaines semaines.

Dans les crèches (et ça doit être aussi applicable dans les écoles maternelles), comment concilier la fougue de l'enfance et les consignes sanitaires ? Ces enfants, dès qu'ils savent marcher, se jettent les uns sur les autres, se tirent les cheveux, se mordent. Ils demandent des câlins. Ils ont besoin d'être changés régulièrement. Comment prendre en compte des consignes sanitaires avec des enfants en bas âge qui n'accepteront ni masque ni distance ?

Il reste l'attente des parents. Une grande partie (dont Docteure et moi) espère pouvoir remettre leurs enfants à la crèche ou à l'école. Retrouver un calme plus propice au télétravail, à la concentration, et ceci plus longtemps que le temps d'une sieste. Personnellement j'espère aussi que Grande Fille retrouve la crèche pour qu'elle retrouve des moments sans ses parents, qu'elle ne reste pas 6 mois avec nous, ce qui me semble la pire des manières pour la préparer à la rentrée en maternelle en septembre.

Si on en revient à l'exemple de la crèche de Grande Fille, il va être quasiment impossible de répondre correctement aux trois critères. La variable d'ajustement sera surement celle des parents, spécialement si la demande est supérieure à la capacité d'accueil, ce qui paraît le plus logique. Ensuite il semblerait que la crèche s'oriente vers une réouverture avec un accueil au maximum à 50% de sa capacité. Moins d'enfants, moins de personnel disponible et plus d'espace, tient-on la solution miracle à cette équation du 11 mai ?


dimanche 26 avril 2020

Contestation

Le ton monte. Le gouvernement se voit de plus en plus contesté. Il l'est depuis longtemps par l'opposition. C'est normal même si cette dernière paraît faire preuve de retenue dans cette guerre contre l'épidémie. La contestation s'amplifie car avec le temps il apparaît de façon de plus en plus flagrante que ce gouvernement avance à l'aveugle (ce qui pourrait être excusable dans une situation inédite de cet ampleur) mais aussi comme un sourd. C'est là que ça se complique. Depuis 2017 j'ai appris à connaitre ce gouvernement hautain, méprisant avec ses opposants, même quand ces derniers ont raison. C'est ainsi qu'on a pu voir par exemple des députés LREM voter comme des députés godillots le refus d'augmenter la durée du congé légale suite au décès d'un enfant mineur pour faire passer quelques semaines plus tard une loi identique mais issue cette fois-ci de leur camp.

Jusqu'à présent dans cette crise, le gouvernement montrait les efforts mis en place, précisant comme pour se dédouaner de toute responsabilité qu'il agissait en suivant les avis d'un conseil scientifique mis en place pour le guider. Des fissures sont apparues dans la cohésion entre le gouvernement et ce conseil sur la question des masques. Pour rappel le premier envisagerait une obligation uniquement dans les transports en commun quand le second demande le port obligatoire en toutes circonstances.

Nouvel accroc entre le gouvernement et le conseil scientifique sur un des sujets le plus emblématiques de la première phase de déconfinement : la réouverture des écoles. Cette réouverture a été promise par le chef de l'Etat dès le 13 avril. Dans une note du 20 avril, le conseil "propose de maintenir les crèches, les écoles, les collèges, les lycées et les universités fermés jusqu’au mois de septembre." Dans la note suivante (note du 24 avril), le conseil scientifique "prend acte de la décision politique". Ils n'ont donc pas été consultés en amont mais mis devant le fait accompli, comme tout le monde. Ils ont eu dix jours pour réfléchir à des pré-requis et des préconisations. Dans cette note où ils insistent sur le "principe de volontariat et de non obligation" (quelque chose me dit que les personnes constituant ce conseil ne vont pas remettre leurs enfants à l'école), il ressort trois points essentiels :
  • les personnels de direction, les enseignants et les associations de parents d'élèves doivent être associés tout au long du processus de réouverture des écoles
    (je comprends, contrairement à ce qui est fait habituellement avec ce gouvernement ?)
  • l'importance d'organiser la formation et l'éducation sur les mesures barrières et la distanciation sociale et s'assurer que l'organisation des établissements scolaires permettent leur mise en œuvre avant l'ouverture.
    (je comprends, vous avez deux semaines pour former les enseignants et les parents et trouver une organisation pour qu'il n'y ait pas des attroupements dans les cours de récréation ou à la sortie de l'école)
  • l'ouverture doit s'intégrer dans une démarche expérimentale et continuer de s'adapter en fonction de l'évolution de a situation sanitaire.
    (je comprends, vous avez voulu la réouverture, vous l'avez, mais si on doit pouvoir tout fermer de nouveau très rapidement s'il s'avère que c'est une grosse connerie comme on le pense).

Le gouvernement part donc à l'assaut de la crise sanitaire en laissant ses meilleurs experts à la maison. Heureusement, il a toujours son armée de godillots, doigt sur la couture, toujours prêts à partir au front pour son chef de guerre et ses ministres... ou non. Dans les rangs mêmes des députés LREM la contestation aussi prend place. Il faut dire que le parti présidentiel a un peu trop pris la confiance. Il aura fallu batailler pour obtenir un vote des parlementaires sur la solution de flicage des Français (dit aussi tracking en novlangue startup nation). Pire, ils apprennent ce dimanche qu'ils prendront connaissance mardi matin des mesures de déconfinement. Et comme ils ont insisté pour qu'on prenne leur voix en compte, ils voteront dès e mardi soir sur les mesures proposées. Nous assistons à un respect du travail parlementaire digne d'un 49-3...
On peut comprendre le réveil des députés LREM. Les autres fois ils n'étaient pas concernés par les lois qu'ils votaient. Ils pouvaient donc se permettre de diminuer les APL, réduire l'aide médicale d'Etat ou toucher à la retraite de ceux qui n'ont pas de complémentaires. Cette fois-ci ce sont leurs enfants, leurs parents qui sont visés par ces mesures. Cette fois, ils auraient bien voulu faire leur travail de parlementaires, de construction et de contrôles des lois.
 
Nous sommes le 26 avril, dans deux semaines le déconfinement va commencer, les écoles vont rouvrir pourtant les scientifiques sont plus que réticents. Les parlementaires ne sont pas associés aux mesures prises puisqu'ils ne sont qu'une chambre d'enregistrement. Le gouvernement est de plus en plus seul, contesté par son opposition comme par ses soutiens. Et pourtant pour la phase suivante, il demandera l'union nationale des politiques et de nouveaux sacrifices aux Français. L'union ne se décrète pas, en revanche la contestation peut se prédire...

Confection

L'utilisation du masque rassure. Associé aux gestes barrières, il doit permettre d'éviter de contracter le Covid-19. Porté par un interlocuteur il rassure car si celui-ci est porteur asymptomatique, alors son masque doit éviter la propagation du virus. Récemment, c'est l'Académie de Médecine qui demande que son port soit obligatoire. Pourtant, depuis le début de la pandémie, il y a de nombreuses polémiques sur ces masques, les stocks de l'Etat ou sur leur approvisionnement.

Aux dernières nouvelles, d'après le magazine Challenges, "Santé publique France a fait tester le stock de 750 millions de masques chirurgicaux. Résultat, seule une centaine de millions étaient "efficaces" [...] En mai 2019, l'agence publiait l'avis de médecins-experts sur la constitution d'un stock stratégique en cas de pandémie : "Le besoin est d'une boîte de 50 masques par foyer, à raison de 20 millions de boîtes en cas d'atteinte de 30% de la population." D'où la recommandation d'un stock de 1 milliard de masques." Les prédécesseurs de Macron n'auraient donc pas jeter les masques qui ont valu à Roselyne Bachelot d'être la risée des commentateurs politique, ils n'en auraient pas pris assez soin en renouvelant le stock régulièrement.

Oublions nos masques disparus, à partir du 4 mai, des masques seront en vente pour le grand public. L'Etat est en train d'étudier quels seront les lieux de vente et surtout le prix de vente. Pour éviter une flambée des prix, le gouvernement réfléchit à encadrer les prix de vente, surement aux alentours de 5€ l'unité.Cette ouverture de vente risque aussi de mettre en évidence les carences de production des masques. On devrait atteindre une production de 15 millions de masques en tissu par semaine. Faites le calcul, 15 millions de masques produit par semaine pour 67 millions de Français, il faudrait donc 5 semaines pour approvisionner tout le monde avec un simple et unique masque (alors qu'il faut le changer, le laver et donc en avoir un peu en rab chez soi).

Il y aura aussi un problème d'approvisionnement pour tous les foyers avec des difficultés financières. Pendant cette crise, beaucoup d'emplois sont supprimés (pour les auto-entrepreneurs) ou mis en chômage partiel. Il y a aujourd'hui plus de 10 millions de Français touchés, dont plus de 90% des employés du BTP ou de l'hôtellerie-restauration. Les SDF aussi sont directement victimes car il leur sera difficile de se protéger.

Pour toutes ces raisons, la Mairie du 4ème arrondissement de Paris a mis en place un service de confection de masques en tissus. En prenant rendez-vous, on peut
  • récupérer des matières premières pour fabriquer des masques, 
  • déposer des masques pour que la Mairie puisse les distribuer aux plus démunis
  • coudre sur place, des machines sont mises à disposition.
Ici, c'est Docteure qui s'y colle. Vendredi après-midi, elle a récupéré de quoi fabriquer 15 masques en tissus. Ce samedi, elle a commencé sa petite chaine de montage : découpe, couture, pliage, couture et autres étapes nécessaires. Ce dimanche elle devrait avoir une première fournée de masques à partager. En Suisse, c'est ma petite sœur qui a mis la machine en route pour fournir ses voisins d'immeuble.
C'est toujours beau et dommage à la fois de voir ce genre de geste. C'est dommage car c'est le rôle de l'Etat de garantir la santé publique et d'aider les plus démunis au lieu d'aider les entreprises. C'est beau car on est tous dans la même galère et qu'en aidant ceux qui en ont le plus besoin, on montre qu'on ne les oublie pas. Ce n'est pas parce qu'on ne les voit plus ou moins qu'on ne pense pas à eux.
Merci à toutes et à tous ceux qui œuvrent, même en petite quantité, pour que tout le monde puisse vivre au mieux cette période difficile.

vendredi 24 avril 2020

Comportement

Aujourd'hui, c'est jour de sortie. C'est ma troisième sortie depuis le début du confinement. Comme je ne sors qu'un vendredi sur deux pour faire les courses de la semaine, nous en sommes donc en fin de 6ème semaine. Ces sorties espacées me permettent de voir si les comportements évoluent. En illustration, c'est ce qui me marque le plus à chaque sortie. Puisque les transports en commun sont quasiment inexistants en journée, ce ne sont plus des publicités dans les abribus mais des messages de soutien et de prévention.

Lors de ma première sortie, en fin de deuxième semaine, j’avais été surpris de l’ambiance « ville fantôme ». Quasiment pas de voiture dans les rues, pas de deux roues (motorisés ou non) et très peu de piétons (moins de 10) croisés sur mon aller-retour entre mon domicile et mon supermarché. Je pouvais traverser sans me soucier de regarder à droite et à gauche. J’avais vraiment l’impression d’être seul au monde. Seul mon supermarché me rassurait sur le fait que je n’étais pas le seul en ville. Il fallait faire la queue pour accéder aux caisses. En marchant, j’étais presque surpris de croiser toujours au même endroit cet homme qui fait la manche. Son « chiffre d’affaire » ne doit pas être faramineux dans ces conditions.

Deux semaines plus tard, le soleil est revenu. La ville n’est plus une ville fantôme. Des joggeurs courent, une ou deux familles avec enfants sont de sortie. Le nombre de voitures a légèrement augmenté mais on est toujours loin de la circulation habituelle en contre-bas de la Place de la Bastille. En allant au supermarché, j’ai encore croisé cet homme qui fait la manche, il s’est mis au commerce de petites peluches fluo. Je me demande si ça aide son « chiffre d’affaire »… Au supermarché, pas d’évolution niveau fréquentation mais l’état des rayons me surprend toujours. Je me pose des questions sur le comportement des consommateurs. Est-ce que ce sont les mêmes personnes qui se ruent sur la levure de boulanger et sur le pain de mie avec croute (le pain de mie sans croute n’ayant visiblement pas de succès) ? Les gens qui ont pris tout le stock de tomates pelées en conserve ont-ils aussi pris toutes les bières en bouteilles de 75cl ?

Aujourd’hui, fin de semaine 6, le soleil est toujours là et il chauffe. Il semble aussi échauffer les esprits des rares personnes qui sortent. Sur la totalité de ma sortie, j’ai croisé un homme gueulant comme un putois envers la boulangerie, un couple s’énervant sur une histoire de qui prend le panier du supermarché, des livreurs Uber eat en colère car ils devaient attendre leur chargement. Mon vendeur de peluches fluo était toujours là mais en train de se faire embarquer son chargement par la maréchaussée. J’espère qu’il ne s’est pas pris une amende pour non-respect du confinement. Côté circulation, il y a toujours plus de voitures et camionnettes mais toujours pas de deux roues. Cette absence de deux roues m’interpelle de plus en plus… Il n’y a bien sûr plus de joggeur puisque la pratique est devenue interdite en journée mais j’ai croisé plus de promeneurs, dont des familles différentes discutant au coin de la rue. Ce n’est pas interdit de discuter mais j’ai du mal à croire à la rencontre fortuite. Ils m’ont fait penser à ma tante et sa fille qui se donnent rendez-vous au supermarché pour faire leurs courses en discutant, telles deux agentes secret en mission. Dans mon analyse hautement scientifique du comportement des consommateurs, ma théorie sur le lien entre tomates pelées et bières en bouteille de 75cl se confirme. Cette semaine il y avait les deux. En revanche il est toujours difficile de trouver du pain de mie avec croute et de la levure de boulanger.

En résumé, après 6 semaines de confinement, tout le monde continue de bien se comporter et de respecter les distances de sécurité même si je sens poindre un peu d’agacement. Ma prochaine sortie devrait être la dernière du confinement généralisé. Aurais-je encore envie d’acheter du pain de mie ? Reverrais-je des deux roues ? Mon supermarché sera-t-il ouvert le 8 mai ? Vivement ma 4ème sortie !

jeudi 23 avril 2020

Confusion

Ce qui est bien avec notre gouvernement, c'est qu'il lutte vraiment contre l'ennui de la population confinée. Sa méthode est imparable et fonctionne depuis le début de l'épidémie, dire tout est son contraire afin d'amener de la confusion partout. Toute nouvelle sortie d'un membre du gouvernement ou du Président contredit les propos de la veille. A croire qu'eux aussi s'ennuient et n'ont trouvé que ça comme occupation.

Hier je soulignais le coup dur de m'imaginer coincé en Ile-de-France en cas de déconfinement régionalisé. Cette crainte venait des propos de l'Emmanuel Macron du 22 avril en déplacement en Bretagne. Comme souvent en situation de mauvaise communication au sein d'une équipe, l'inverse a été dit le lendemain par... Emmanuel Macron lui-même. Le Président du 23 avril imagine une solution qui sera adapté à la réalité de chaque territoire. Difficile de comprendre la nuance ? C'est surement tout aussi confus dans la tête du Président de la République. Aurons nous le droit de circuler sauf dans certaines villes qui seront toujours fermées. La réponse viendra peut-être du Président du 24 avril ou plus surement de celui du 10 mai.

L'autre sujet de confusion devient de plus en plus une sorte de running gag entre nos gouvernants, le port du masque. En deux mois, nous sommes passés par toutes les étapes : c'est inutile, ça pourrait être utile mais vous êtes trop nuls pour les utiliser, c'est utile et tout le monde en aura. A présent, l'Académie de médecine propose de le rendre obligatoire. Nos dirigeants, toujours à l'écoute des scientifiques, prévoient donc de le rendre obligatoire uniquement dans les transports en commun. Oui ce sont seulement les transports en commun qui sont à risque... Dans le même temps une étude sur la situation de Crépy en Valois (le premier gros foyer de contagion en France) montre que 41% des personnes fréquentant le lycée (étudiants, professeurs, personnels) ont été infectés. Je doute que toutes ces personnes étaient dans le même bus scolaire... En prévision de la réouverture des écoles, peut-être faut-il prévoir des masques pour tout le monde ? Passer 8 heures dans une classe de 30 élèves, le principe de précaution demande surement de se protéger un minimum.

Nous devrions pourtant ne pas être surpris de l'absence de solution définitive. Le Président avait annoncé le 13 avril que son gouvernement présenterait une feuille de route du déconfinement au bout de deux semaines (donc vers le 27 avril). Une semaine plus tard, le Premier Ministre annonçait une feuille de route du déconfinement deux semaines plus tard (donc le 4 mai). Comment ça ce n'est pas clair la date à laquelle nous aurons des informations ?
Le problème, et c'est surement le drame, à quoi ça sert de vouloir se mettre en scène en Banlieue, en Bretagne ou devant une vingtaine de maires (quand la France en compte 35 000) pour ne donner que des pistes qui contredisent celles de la veille. Ça n'apporte que du bruit au bruit ambiant et ajoute de la confusion à tous les étages. Un peu de calme, de sérénité et d'informations fiables feraient du bien à tous.

Contrecoup

Quand le moral va, tout va. L'espoir du 11 mai aide beaucoup à mettre du baume au cœur, même si j'ai bien compris que tout ne reviendra pas à la normale tout de suite. En plus je suis d'un naturel optimiste, voire naïf (je croyais dur comme fer à la tenue du Hellfest fin juin). Alors quand vient l'inévitable contrecoup, le choc est dur à encaisser. Aujourd'hui, j'en ai eu ma dose...

Ce mercredi matin, réveil par les infos à la radio, on y parle de risque de deuxième vague à venir alors qu'on ne voit pas la fin de la première. Le Singapour exemplaire se prend un effet boomerang. En France, avec nos potentiels 6% des Français infectés, on est loin de gagner l'immunité. Je ne vais pas aller jusqu'à envier les Suédois qui ont pris le pari homicidaire de ne pas confiner la population (en même temps dès qu'on s'écarte des grandes villes suédoises, la vie ressemble vite à une vie confinée), mais que signifierait une deuxième vague ? Une nouvelle période de 2 mois de confinement à l'automne (et d'autres tous les ans jusqu'à l'arrivée d'un vaccin) ? J'ose rêver à une solution qui ressemblerait à ma vision post 11 mai, avec des magasins ouverts mais pas surpeuplés, des écoles ouvertes mais un télétravail encouragé. Est-ce ma naïveté ou un espoir réaliste ?

Deuxième contrecoup, assez proche du premier en prenant un peu de recul. Le retour des supporters dans les stades et des concerts ne serait possible au plus tôt qu'à l'automne 2021 ! Pour le moment ce n'est qu'une recommandation de scientifiques mais comment imaginer toute une saison de sport sans public. Ça signifierait l'absence de l'Euro de football et des JO déjà décalés d'un an mais aussi une absence de festivals et d'autres concerts pendant 2 ans. L'avenir n'est pas si rose dans cette optique.

Troisième contrecoup, le gouvernement serait favorable à une interdiction des déplacements interrégionaux pendant le déconfinement, c'est à dire au moins jusqu'à mi-juin ! Il nous serait impossible d'aller voir les parents. J'en regretterais presque de ne pas m'être exilé en province au début du confinement comme la moitié de mon immeuble. Je n'arrive pas à imaginer cette mesure qui ralentirait encore plus la relance de l'économie pour tous ceux qui comptent sur le tourisme (et il n'y a pas que les plages de la Côte d'Azur qui en pâtiraient mais aussi tous les gites et autres chambres d'hôtes aux six coins de l'Hexagone). Surtout si on mélange interdiction de déplacements interrégionaux et deuxième vague...

Photo de Mathieu Delmestre
Pour parachever cette journée où pas grand chose ne va, le contrecoup ultime. Je ne le savais pas mais quand on est atteint du Covid-19 il y a aussi deux pics de la maladie, un peu comme cette satanée deuxième vague. J'ai eu le malheur de découvrir cette information aujourd'hui avec le décès d'un autre grand socialiste parisien. Alain Le Garrec, ancien secrétaire de section du 1er arrondissement, élu socialiste d'opposition dans ce 1er arrondissement, expert et amoureux des arrondissements du centre de Paris, il était à mes yeux l'incarnation du rassemblement des 4 arrondissements du centre, ce rassemblement dont on a vécu les premiers pas lors du 1er tour tant décrié des municipales. Il aura eu le bonheur de voir notre tête de liste, sa liste où il était aussi candidat, arrivé en tête même dans son arrondissement conservateur. Il avait attrapé ce Covid-19. Certains de ses proches le pensaient sorti d'affaire, c'était sans compter sur ce deuxième pic fatal... J'ai une pensée émue pour ses camarades les plus proches qui l'ont supportés (car il savait gueuler) et suivis toutes ces années et bien sûr une pensée pour ses proches, ses amis et sa famille qui ont perdu un être extraordinaire.

Pour finir sur une note un peu plus joyeuse, voici LE morceau qui me met en joie depuis le début de cette période. Merci Casey pour cette énergie et ses propos !

mardi 21 avril 2020

Consommation

D'après l'attestation connue de tous, seuls les déplacements pour effectuer des achats de première nécessité sont autorisés. Depuis le début de cette période à domicile, on essaye de faire au mieux avec notre propre interprétation de la première nécessité. Avec Docteure, on alterne chaque vendredi matin pour partir en expédition "course de première nécessité", une sortie tous les 15 jours ! Toutes les semaines on charge à bloc notre sac à dos de randonnée et notre sac de course réutilisable pour faire tenir une nouvelle semaine de siège. Il faudrait vendredi que je pèse la masse de nos victuailles, juste pour voir ce que pèse réellement notre consommation.

Ces courses correspondent à des achats de première nécessité car ce n'est que des choses à boire ou à manger. Dans cette définition, le saucisson, la bouteille de Kwak de 75cl ou la boite de Monaco sont des produits de première nécessité, nécessaire pour garantir quelques moments agréables et reposants une fois Grande Fille dans sa chambre pour la nuit (endormie serait mentir).

En bons élèves du confinement, on s'est aussi abstenu de nos habituelles livraisons à domicile de plats préparés. Avouons le, c'est un peu difficile de faire une croix sur une livraison de sushis ou de pizza quand on est crevé de notre journée. Il n'y a vraiment pas de raison qu'on incite l'exploitation de travailleurs précaires quand les conditions sanitaires ne sont pas respectées. On en profitera surement de nouveau lors du retour à la normale, mais comme on essaye de commander dans les restaurants qui ont leurs propres livreurs, on a moins l'impression d'avoir hâte de redevenir de vils profiteurs capitalistes.

En revanche nous commençons à nous confronter à un problème plus sérieux, la Mode (enfin les vêtements). Une enfant de deux ans, ça grandit. On commence à être à court de vêtement d'été à sa taille. Le plus problématique est arrivé il y a 2 ou 3 semaines. Grande Fille ne voulait plus mettre ses chaussures, elles lui faisaient mal. Cette paire a réussi à tenir tout l'hiver, bien sûr qu'elle est à présent trop petite ! Mais début mars, on pensait avoir le temps et attendre les premiers beaux jours pour trouver chaussure à son pied. Les magasins de chaussures pour enfants ne sont pas dans la liste des établissements autorisés à recevoir du public. Il a donc fallu nous résoudre à faire appel à la vente par correspondance et faire se déplacer un livreur pour un besoin qui n'est pas vraiment de première nécessité. Lui aussi a du se dire mais pourquoi me force-t-on à sortir pour une broutille telle qu'une petite boite de chaussures...

Dès le début les libraires se sont plaints de leur fermeture forcée. Le 16 avril, c'était Amazon qui était contraint de fermer ses entrepôts français (mais continue à livrer les produits s'ils sont en stock dans les pays limitrophes). A chaque fois, on comprend que leur fond de commerce n'est pas le plus nécessaire. Après plus d'un mois de confinement, est-ce que la définition des produits de première nécessité reste la même ? Les stocks de craies, de feutres et de coloriages sont à renouveler pour les enfants. Pour les plus grands, lecture et loisir peuvent commencer à manquer (comme par exemple des jeux de société), sans oublier l'électroménager. Je n'ose imaginer la panne de mon lave-linge ou de mon four en ce moment. Comment ferais-je ?
En Allemagne, le déconfinement a commencé et les magasins de moins de 800 m² peuvent rouvrir. J'espère qu'il en sera de même chez nous prochainement, histoire qu'on puisse de nouveau consommer les produits qui nous sont nécessaires ou a minima arrêter d'avoir peur en lançant une lessive.

Pour finir, une petite chanson vaguement en lien avec notre virus chinois d'un groupe que j'ai vraiment hâte de retrouver dans une salle de concert tout en consommant une bière hors de prix :

lundi 20 avril 2020

Condition

Dimanche après-midi, sous un beau soleil printanier je jouais à "Jacques a dit" pendant qu'à la télévision, à la radio et sur internet le gouvernement jouait à "Edouard n'a pas dit". Edouard Philippe a tenu deux longues heures alors que moi à peine 5 minutes. Il fallait bien ce long temps d'explication pour annoncer le retard d'une semaine sur le plan de déconfinement demandé lundi dernier par le Président à son gouvernement. Espérons que cette semaine de retard n'annonce pas un recul de la sacro-sainte date du 11 mai.

Je devrais commencer à désacraliser ce 11 mai. Il ne sera que le début de la "phase suivante" d'après le Premier Ministre. Combien y a-t-il de phases ? Je ne crois pas qu'il ait évoqué ce point. Tout ce qu'on sait, c'est que le 11 mai "ne sera pas la vie d'avant". Personnellement, ça ne me dérange pas de continuer le télétravail si dans le même temps Grande Fille peut reprendre le chemin de la crèche et que nous pouvons reprendre les sorties familiales en plein air dans les parcs et les bois.

C'est tout le drame de ce qui se joue actuellement, nous ne savons rien de ce qui sera possible dans un premier temps ni dans les temps suivants. Il manque quelque chose comme des conditions de sortie. C'est peut-être mon côté informaticien mais je suis plus en confiance quand j'ai une "Definition of Done" (ou définition du réalisé) clairement énoncée. Cette définition a pour but de décrire précisément les critères à remplir pour qu'une tâche soit considérée comme officiellement terminée. Voici quelques exemples liés à notre situation :
  • il ne faut plus de mort du Covid-19 pour considérer cette épidémie enrayée, ou
  • il faut moins de X nouvelles admissions en soins intensifs concernant cette maladie pour rouvrir les restaurants et les salles de concerts (d'ailleurs y aura-t-il un lien entre réouverture de salles de concerts et restaurants ?)
  • Il faut moins de N personnes testées positives dans Paris pour rouvrir les parcs (inclus celui des Berges de Seine) et pour autoriser la reprise de la course à pied et des sorties en vélo.
Sur la papier, l'exercice gouvernemental d'hier est positif pour donner de l'avancement, faire preuve de transparence. Mais il n'y a d'intérêt à parler pendant deux heures pour dire qu'on avance lentement qu'à condition qu'on sache tous à quoi va ressembler la ligne d'arrivée ? Sans ça, il est presque normal d'observer certaines formes de laisser aller les week-ends.

Cette absence de conditions à respecter pour un retour à la normale rend aussi l'exercice démocratique difficile. Le ministère de la Cohésion des territoires semblait dire hier que le second tour des élections municipales pourrait se dérouler vers fin septembre / octobre. Le 15 mars on avait voté le premier tour la veille du confinement général (avec des conséquences dramatiques d'après cette enquête de FranceInfo). Est-ce que ça signifie que toutes les conditions sanitaires seront réunies au début de l'automne pour reprendre la campagne électorale jusqu'à son dénouement ? Ou est-ce un calendrier envisagé pour ne pas faire percuter congés d'été et opérations de vote ?

Ces conditions permettent de se projeter, d'avoir un peu plus confiance dans un gouvernement qui jusqu'à présent semble nous confiner à vue. En ayant toutes les informations, même sans avoir toutes les cartes en main pour agir sur les différents leviers, on comprendra surement un peu mieux les conditions dans lesquelles on vit.

dimanche 19 avril 2020

Concert

C'est le printemps, le beau temps est de retour et la saison des festivals et des concerts aurait du battre son plein. J'attendais avec beaucoup d'impatience mes concerts de Russian Circle (annulé juste avant le confinement), mes week-ends de festival à Londres et à Clisson pour vivre ces week-ends hors du temps, comme immergé dans un monde parallèle. 

La logique sanitaire faisait qu'on le pressentait. Notre Président l'a confirmé, aucun grand rassemblement ne pourra se tenir avant mi-juillet. Au revoir Printemps de Bourges, Hellfest, Eurockéennes, Vieilles Charrues et tous les autres. Comme à son habitude, le gouvernement en a profité pour ajouter un peu de confusion à la situation. Le ministre de la Culture annonce que les "petits" festivals devraient pouvoir se tenir dès le 11 mai. Dans quelles conditions ? A partir de quelle taille un festival devient grand ? Chez nos voisins allemands, ils s'orientent vers une fermeture des salles de concerts pendant 18 mois !

C'est pourtant l'avenir de ces petites, grandes et gigantesques structures qui sont en jeu actuellement. Les organisateurs des festivals se sont légitimement tournés vers leurs assureurs. Le Hellfest a bien fait passer le message que son assureur est un salaud. ALBINGIA (pour ne pas les nommer) se sont montrés efficaces pour encaisser en décembre le chèque de 175 000€ pour couvrir les risques d'annulation du festival. Aujourd'hui et comme le dit l'organisation du Hellfest : "Pour ALBINGIA la solidarité c’est pour les autres, quitte à mettre en péril économiquement leurs assurés. Leur raisonnement est simple, prendre nos cotisations pour une assurance annulation : OUI, nous indemniser : JAMAIS." Pour de nombreux autres festivals, l'assurance n'existe pas ou le contrat pas encore signé. C'est le cas des Eurockéennes qui attend habituellement février/mars pour signer un contrat d'assurance en fonction de leur programmation. Pour eux, il leur faudra être inventif pour limiter les frais.

C'est aussi l'avenir des personnes, de tous les intermittents du spectacle qui travaillent pour ces événements qui est en jeu. Pour avoir droit à leur assurance-chômage, ils doivent travailler au moins 507 heures sur douze mois. Comment réussir à remplir ce quota d'heures quand toutes les manifestations culturelles sont annulées ? Il semblerait que les douze mois soient prolongés de la durée du confinement. Comment cette mesure pourrait être suffisante pour assurer un avenir serein à toutes ces personnes sur le carreau ?

L'absence de concerts met aussi un sacré frein à la promotion d'artistes qui ont sorti leur album en début d'année 2020 et qui comptait sur leur tournée pour se faire connaitre ou faire connaitre leur dernière fournée. J'ai une pensée toute particulière pour les excellents Thomas Howard Memorial qui ont sorti leur nouvel album Bonaventura le 31 janvier. Une pensée toute particulière pour eux car ils sont bons et ce sont des amis. Une pensée toute particulière pour eux car ils ont été un peu des visionnaires en réalisant une sorte de concert confiné, enregistrant un magnifique film dans le lac de Guerledan exceptionnellement asséché.

Regardez ce magnifique concert (et courrez acheter le DVD dès le 11 mai) :

samedi 18 avril 2020

Contact

Au quotidien, finies les petites discussions au détour d'un couloir sur la belle météo pour la saison, sur les activités du week-end ou sur la dernière journée de championnat. Terminés les apéros entre collègues à la sortie du boulot ou les restos entre amis jusqu'à pas d'heure. Reportées les visites aux parents ou grands-parents. Mis en suspens les week-ends avec la belle-soeur.

Vraiment ? On serait tous contraints au repli sur soi, à l'isolement, à la solitude, à l'absence de communication avec toute autre personne que soi devant sa glace ?

Pas vraiment, non ! Depuis le début de cette période un peu folle, Internet regorge d'idées et d'outils pour garder le contact, voire même pour le développer. Presque tous les jours en fin d'après-midi Grande Fille demande sa demi-heure d'histoires avec une de ses grands-mères. A deux ans et demi, elle peste comme une grande quand la connexion fait des siennes et qu'on ne peut pas voir Mamie dans l'ordinateur. Elle apprend aussi les règles de la communication comme ne pas mettre ses doigts dans la bouche si elle veut que Mamie la comprenne. Grande Fille communique bien plus régulièrement avec ses grands-parents aujourd'hui qu'il y a deux mois, pour le plus grand plaisir de tous.

Pour les plus grands aussi on se retrouve et un nouvel agenda se met en place. Un soir par semaine, Docteure redécouvre les joies des jeux de rôles avec ses amis. Ça devait faire des années qu'elle ne s'y était pas adonnée et jamais à cette fréquence depuis que je la connais.
Le vendredi soir n'a presque pas changé. Entre amis et collègues, on se retrouve autour d'un mojito, une bouteille de vin, un verre d'un antique rhum ou un alcool de dattes. On raconte n'importe quoi, on continue de se plaindre, de rire, de refaire le monde. Certes on est un peu moins nombreux, on ne peut pas lancer plusieurs conversations en même temps, on ne peux plus faire râler notre serveur-se préféré-e en ne regroupant pas nos commandes, en revanche plus de contrainte d'enfant à nourrir ou coucher, plus d'urgence avec le dernier RER (pour ceux qui auraient déjà pris un peu plus de temps). On peut s'attarder pour écouter à quoi ressemble le confinement à Mayotte devant une plage aguichante mais interdite, pour regarder les chats de l'autre se régaler du saumon de leurs maitres ou pour partir sans une défense enflammée de la retraite par répartition

Ces nouveaux moments de convivialité ne peuvent remplacer la richesse des contacts physiques mais sont bien plus qu'un pis aller. Ce genre de moments se multiplient un peu partout, des pensionnaires de maisons de retraite retrouvent un contact avec leurs enfants et petits-enfants et découvrent eux aussi les joies de la visioconférence. Certains de ces moments semblent se fondre tellement bien dans notre quotidien que je ne vois pas pourquoi ils devraient disparaître avec la fin du confinement.

Ces nouveaux moments mettent aussi en exergue la fracture numérique qui existe toujours. La personne en zone blanche ne pourra pas partager son coucher de soleil avec sa fratrie partie à la ville. L'écolier ou l'étudiant aura plus de mal à bénéficier d'un suivi pédagogique s'il n'a pas un PC ou une connexion internet chez lui. Dans ce monde d'après, il ne faudra pas oublier ces endroits laissés pour compte car pas assez rentable. Si internet peut simplifier largement la vie, son absence peut singulièrement la compliquer.

En bonus, on peut même en profiter pour continuer à faire de la musique avec ses amis :

vendredi 17 avril 2020

Condoléances

La page noire des décès se remplit à une vitesse singulière cette semaine. La nouvelle de la mort de Christophe ce matin fut dure. L'annonce n'est pas un choc ou une surprise. On le savait malade, on le savait hospitalisé dans un état inquiétant. Plus fragile qu'un Boris Johnson, Christophe n'aura pas vaincu ce foutu Covid.

C'est un monstre discret de la chanson française qui s'en va. J'avais eu beaucoup de plaisir à le découvrir sur le parvis de l'Hôtel de Ville lors d'un Fnac Live en 2011. Découvrir car avouons le, à part Aline et les Mots Bleus, je ne connaissais rien de lui à l'époque. Par la suite, sa reprise d'Alcaline de mon Dieu et Maître Alain Bashung m'avait subjugué. En 2016, l'homme me surprend encore avec l'album et la chanson titre "Les vestiges du chaos". Suite à l'annonce de son hospitalisation, je découvre son magnifique album "Intime", moment de grâce d'un homme seul face à sa musique.


L'annonce du décès de Christophe succède à l'annonce hier de la mort de Danièle Hoffman-Rispal. Une socialiste extraordinaire qui me fascinait quand je l'écoutais lors des réunions de Besoin de Gauche. Sa voix inimitable, son franc parler et ses analyses m'impressionnaient (je me souviens encore de son coup de gueule contre les militants socialistes qui tractaient en cravate sur les marchés). Son parcours politique est incroyable et fait d'elle une figure incontournable de la Gauche parisienne sans que je sache vraiment pourquoi elle n'en fut pas une figure nationale. Cette ancienne couturière et comptable du Sentier fut élue dans le 11ème arrondissement de Paris dès 1995. Elle fut la première première adjointe de Bertrand Delanoë en 2001. En 2002, elle est élue député alors qu'elle a face à elle Georges Sarre, maire du 11ème arrondissement depuis 1995 et ancien ministre. En 2007, elle est réélue sur le score incroyable de 69% (aucun-e député-e socialiste n'aura fait mieux lors de cette élection). En 2012, Martine Aubry la sacrifie sur l'autel des accords avec Europe Écologie - Les Verts et elle n'est que suppléante de Cécile Duflot.

De Danièle, j'ai toujours en tête ses propos tenus lors de l'AG parisienne de Besoin de Gauche à la veille des primaires de 2011. Alors que le courant se scindait entre soutiens à Hollande et soutiens à Aubry, elle nous dit à peu de choses près ces propos:
"On s'est séparé et on s'est retrouvé après Rocard. Cette fois-ci la séparation sera définitive. Regardons-nous bien une dernière fois car selon les choix que vous ferez, cette fois-ci nous ne nous retrouverons plus".
Six ans plus tard, une grande partie des présents de ce soir là qui avaient suivi Hollande sont devenus des membres éminents d'En Marche (ministre, députés)...

Pour ce dernier au revoir, un morceau tout aussi fou que vous ne l'étiez :

Compétition

Ce week-end j'aurais dû être à Vienne, en Autriche. Un peu de tourisme mais surtout le moment fort de mon activité sportive de l'année, mon marathon annuel. Après avoir couru deux années de suite le Marathon de Paris, je me suis mis en tête d'allier course à pied et voyage. Tout a commencé par San Francisco en 2018, puis Rotterdam en 2019. Le millésime 2020 devait donc faire la part belle à l'Autriche, à la ville de Klimt et du premier marathon de l'histoire couru en moins de deux heures !

Pour moi ce marathon était mort d'avance. Début mars mon médecin m'annonce le combo gagnant du coureur de fond : tendinite et syndrome de l'essuie-glace. L'idée était de reprendre tout doucement, de me mettre au vélo et de reprendre la compétition petit à petit.

Ce week-end, j'aurais dû être à Vienne. J'aurais pris mon dossard, vécu l'effervescence du village de la course, goûté à adrénaline du départ. Je n'aurais surement pas fini la course, la préparation n'aurait pas suffit. C'est le côté positif de ce confinement mondial. Le repos forcé pour se refaire une santé. L'annulation de la course pour ne pas avoir de regret.

Bien sûr pour une annulation qui sauve l'égo d'une personne, il y a des milliers de compétitions annulées, reportées, des millions de sportifs professionnels ou amateurs qui ont peut-être perdu l'occasion d'une vie. Une pensée pour les sportifs qui ont tout fait pour être prêt pour les JO de 2020.

Pour de nombreuses compétitions, c'est la dernière ligne droite qui est rongée.
En football, on s'oriente vers une fin de championnat à huis clos. L'équité sportive sera peut-être respectée, chacun jouera sa chance jusqu'au bout, mais qu'est ce qu'un match de foot sans supporter ? Le football ne serait qu'un produit, comme un film, fait pour faire monter l'audimat de Canal+ et BeIN ?
En handball, le PSG Hand est champion 9 journées avant la fin, la Ligue de handball ayant pris la décision que ça ne servait à rien de jouer des matchs si aucun supporter ne pouvait venir dans la salle. La décision va être un peu plus difficile pour les femmes. Pourra-t-on départager Brest et Metz (qui sont à égalité) ou seront-elles désignées toutes deux championnes ? Le point positif pour ces deux championnats, ils accueilleront deux clubs supplémentaires la saison prochaine, pas de relégation mais deux promotions. Cette épidémie pour ces 4 clubs est aussi un Noël avant l'heure.

Pour l'année 2020, la maxime "l'important est de participer" peut être remise momentanément au placard. Cette année, je choisis "reculer pour mieux sauter" et rendez-vous en 2021 pour de meilleurs moments sportifs.

jeudi 16 avril 2020

Congé

Ce jeudi soir, je "pars" en congés, deux jours posés depuis longtemps pour une raison que j'évoquerai dans le prochain billet. Avec le confinement, les plans ont naturellement changé mais les congés restent.

En temps normal déjà, je suis amateur des congés sans partir de chez moi. Prendre quelques jours pour se reposer, retrouver son chez soi habituellement occupé uniquement les soirs et week-ends, en profiter pour ne rien faire à part lire, jouer à la Switch et regarder la télé.
En temps confiné, ces congés revêtent une toute autre importance pour la petite famille. Ces deux jours vont permettre d'offrir plus de temps calme à Docteure puisque je n'aurai pas mes réunions téléphoniques. Ils vont aussi offrir plus de temps de jeu avec Grande Fille, pour son bonheur et surtout pour le mien. Tant pis si nous n'allons pas faire de vélo sur les berges de Seine, ou voir le potamochère de la ménagerie du Jardin des Plantes.

D'un point de vue plus général, surtout pour les nouveaux télétravailleurs, il faut savoir déconnecter (quelques heures comme quelques jours). Travailler de chez soi peut vite rendre les journées beaucoup trop longues. Travailler sur les horaires normaux d'une journée classique, puis peut-être ajouter un peu de travail pendant la traditionnelle pause méridienne puisque personne n'est là pour partager la pause café post cantine et surtout le soir il est tentant de reprendre le PC pour finir ce qu'on a commencé dans la journée. Sans compter le travail qu'on peut faire à la place du temps de transport. Il est important tous les jours de savoir s'arrêter. C'est peut-être plus facile quand un enfant est là et qu'elle a elle aussi besoin de temps d'attention. Au début du confinement, j'étais perturbé car je n'avais plus mon moment à moi, réservé à l'écoute de la musique et à la lecture, moment que me permet habituellement le RER A. Je me suis donc réservé 30 minutes le midi pour lire et écouter de la musique après manger.

Et les congés dans tout ça ? Ils ont tout autant d'importance que l'attention portée à son rythme de travail quotidien. Ces congés permettent de décompresser et de se reposer, de retrouver un peu de temps en famille si on a la chance de vivre ce confinement. C'est l'occasion aussi d'essayer de profiter des bons conseils qu'on a pu voir passer depuis 1 mois pour occuper ses journées comme profiter des livres au format électronique mis à disposition gratuitement (allez voir ces sélections des Éditions Libertalia et La Découverte), des nouvelles recettes de cuisine ou découvrir des concerts à la maison comme ceux qui ont eu lieu dans le cadre du festival Stay Rock, Stay Home (ici le punk de La pietà).

Cet appel au repos chez soi vaut surtout pour ceux qui, comme moi, n'ont pas pris de congé depuis le nouvel an, histoire de faire une coupure avant les prochaines grandes vacances estivales. Ceci n'est absolument pas un appel pour prendre des congés à tout prix afin de ne pas prendre de congés plus tard cet été, sous prétexte de relancer l'économie.

Ne nous tuons pas à la tâche, profitons des vacances !

mardi 14 avril 2020

Continuation

Vous en reprendrez bien un peu ? Et nous voila reparti pour 4 nouvelles semaines. Personnellement j'ai l'impression que le plus dur est derrière nous. Avec la petite famille on a pris nos marques, j'ai l'impression que ça fonctionne plutôt pas mal.

Avec Docteure, on essaye de se partager le bureau, l'unique endroit calme de la maison. 4 à 5 heures pour moi et mes réunions, 2 à 3 heures pour elle. Le déséquilibre est flagrant, la période de la sieste de Grande Fille permet d'essayer d'équilibrer la donne. La cuisine quotidienne m'offre des repas bien plus agréables qu'à la cantine. La sortie quotidienne en fin d'après-midi dans la cour avec Grande Fille a des airs de promenade carcérale mais apporte un peu du défoulement nécessaire pour la fatiguer. D'ailleurs les activités avec Grande Fille sont variées, à ce rythme elle deviendra une pro de la cuisine, une peintre accomplie ou une employée de bureau hors pair. Enfin le sacro-saint apéro permet de finir les journées en beauté.

Continuer un mois de plus ?
Pour Docteure, l'annonce est rude. Avec la fermeture des universités jusqu'à septembre, ça signifie pour elle la fin des cours, de tout contact professionnel "dans la vraie vie" et une organisation d'examens en mode chaos. Je ne l'avais jamais réalisé mais nombre d'étudiants n'ont pas de PC chez eux et un accès internet limité à leur téléphone portable. Trouver un mode d'examen réalisable à distance, pertinent, qui n'implique par l'écriture de plusieurs pages de dissertation (sur un téléphone portable, imaginez...) ou qui ne demande pas une longue préparation (pour ne pas léser les nombreux étudiants qui ont trouvé une place en tant qu'employé de supermarché), c'est une épreuve stressante inattendue pour elle.
Pour Grande Fille, étrangement le premier mois s'est bien passée. Elle ne réclame pas de sortie au toboggan, ni de faire du vélo dans la rue. Elle évoque parfois ses amis de la crèche mais ce sont ses grands-mères qui semblent lui manquer le plus. Un de ses jeux préférés est de faire semblant d'être dans le bus ou dans le train pour partir en vacances chez elles. A côté de ça, elle parle de mieux en mieux, s'intéresse à cet étrange processus qu'est l'écriture et commence à nous réciter par cœur ses histoires préférées. La situation n'a pas l'air de la traumatiser.

L'annonce de la réouverture des crèches et des écoles est un peu notre phare dans la nuit. Peu importe le niveau de liberté de mouvement au 11 mai, si déjà Grande Fille peut retrouver ses copains de la crèche et ses nombreuses activités, alors ce sera toujours ça de pris. Ça lui éviterait un coupure trop longue entre mars et septembre et lui éviterait quelques problèmes aux difficultés attendues de la prochaine rentrée en maternelle.


L'étape suivante tant attendue est la réouverture des bars et des restaurants. J'espère qu'il ne faille pas attendre un mois de plus avant de pouvoir retrouver nous aussi un minimum de vie sociale, comme Grande Fille l'aura retrouvée le 11 mai.

En attendant, bon continuation...

lundi 13 avril 2020

Contradiction

Tous les soirs à 20h les rues de Paris et d'ailleurs résonnent d'applaudissements. Tous les soirs à 20h je bouillonne. Non pas que je ne soutienne pas nos personnels soignants mais j'ai un peu de mal avec cette soudaine ferveur entretenue par nos élus, nos députés, nos ministres, ceux là même qui pendant deux ans ont fait la sourde oreille aux revendications de l'hôpital public, ou pire les ont pris de haut, comme le président Macron expliquant à deux soignantes du CHU de Rouen qu'il n'"y a pas d'argent magique". Durant les manifestations contre la réforme des retraites, nous nous applaudissions souvent mutuellement, personnels soignants aux fenêtres de leur établissement ou à côté de leurs banderoles, employés attachés à l'équité de leur système de retraite dans les rues longeant les hôpitaux, tous unis face à un gouvernement sourd.

L'incompréhension est la même face aux contradictions d'un gouvernement prônant le confinement de toute la population et "en même temps" met en place des mesures pour laisser faire la livraison de plats à domicile. Les restaurants sont fermés mais les plateformes qui exploitent les nouveaux forçats de la route peuvent continuer à engranger les profits. Quand les principes de santé publique rencontrent les sacro-saintes lois du marché, ce n'est que rarement les premiers qui gagnent.

Toute cette crise n'est que contradiction gouvernementale :
  • Sur les masques: mi mars "Lorsque nous ne sommes pas malades ou pas soignants, ce n’est pas utile", début avril "Nous encourageons le grand public à porter des masques"
  • Sur les marchés : 24 mars fermeture générale des marchés en France, 3 semaines plus tard le ministre de l'agriculture "appelle les maires et les préfets à inciter à rouvrir ces marchés"
  • Sur l'éducation : les crèches, écoles, collèges et lycées furent les premiers établissements publics à être fermés avant même le début du confinement total. Ce soir Emmanuel Macron annonce qu'ils seront également les premiers à rouvrir... Quelle est la logique derrière ? Même si j'avoue voir d'un bon oeil le fait que Grande Fille puisse de nouveau s'amuser avec des enfants de son âge (que ce soit grâce à la crèche ou à des structures de centre de loisirs).

Contradiction ? Cafouillage ? Amateurisme ? Décisions prises au hasard ? L'impression que c'est la loi du marché qui gouverne est tenace, et ça n'aide pas à se rassurer sur la façon dont on arrivera à sortir sereinement de cette crise.

Pour accompagner ces moments de doute et pour se défouler un peu dans son salon :

Confinement

Tout commença il y a un mois et un jour, le 12 mars 2020... Non tout commença bien plus tôt et bien plus loin. Ou plutôt tout commença il y a un peu moins d'un mois, le 15 mars 2020.
Le 15 mars au soir, alors que j'avais tenu avec de la joie, une certaine fierté et beaucoup d'enthousiasme mon traditionnel bureau de vote, j'ai reçu ce mail des directeurs de ma boîte annonçant le télétravail pour tous suite au passage au stade 3 de l'épidémie de COVID-19. Ça tombait bien, étant toujours un peu fatigué après une journée d'environ 17 heures d'opération électorale, je pourrais dormir un peu plus longtemps au lieu de foncer tête baissée et mal réveillée dans le RER. Le vendredi, j'avais fait une répétition générale de ce télétravail, seul dans mon appartement, le restaurant en bas de chez moi ouvert. Cette répétition se déroulait à merveille, j'ignorais alors que ce n'était pas une répétition des jours futurs mais un adieu momentanée à ma vie d'avant.

Ce dimanche 15 mars est le point de bascule. Une partie non négligeable des Français refusaient de se déplacer pour voter, de peur d'attraper cet effrayant COVID dans le confinement de l'isoloir. Une autre partie non négligeable refusaient de voir la catastrophe venir et revendiquaient haut et fort son droit à profiter de la vie, des terrasses de café, des parcs et du contact avec ses amis.
La veille je sortais avec femme (que l'on nommera "Docteure" pour le reste de l'aventure) et enfant de deux ans et quelques mois (que l'on nommera "Grande Fille" pour le reste de l'aventure), le lendemain on découvrait notre nouvel horizon: un appartement parisien de 55 m² et une cour de taille indéfinie que j'estime à 10 m² environ.

Le confinement m'a déjà mis sous les yeux quelques évidences :
  • ne pas remettre au lendemain (surtout quand ça fait plus d'un mois que tu te dis qu'il faudrait aller chez le coiffeur), 
  • profiter des petits moments de bonheur qui peuvent apparaître au détour d'une bêtise de Grande Fille ou d'un repas de Pâques avec gigot de 7 heures et Morgon
  • savoir s'octroyer un peu de temps à soi (surtout quand on n'a plus le sacro-saint trajet en RER pour lire au calme).
Moins évident, le confinement n'a pas la même représentation partout.
Dans les moteurs de recherche d'images Bing et Qwant, il reste intimement lié au monde carcéral, à la solitude et aux espaces plus que restreints. Pour Google Image le confinement se représentent par de rares piétons masqués et par des gens à leur fenêtre, le confinement ne prenant son sens que confronté à l'extérieur non confiné.
Le confinement n'est pas non plus vécu partout de la même façon. Au calme dans mon canapé, je pense aux personnes seules et/ou malade, car les autres maladies ne prennent pas de repos pendant ce temps là, ces personnes qui se retrouvent avec encore moins de visite qu'avant la bascule. Je pense aux personnes qui ont besoin des autres pour vivre et survivre, aux SDF, aux réfugiés, aux personnes presque sans revenu et qui depuis un mois doivent vivre ce moment comme un moment de lutte de tous les instants, encore plus intense qu'avant. Je pense à tous ceux qu'on oblige à sortir travailler alors qu'à longueur de temps les médias répètent ce credo #RestezALaMaison, la peur de tomber malade, la peur de contaminer sa famille.

Ce journal de con a pour but de traiter de ce nouveau quotidien, de mes réflexions sur le monde d'avant et celui d'après (je n'oublie pas qu'il y a quelques temps qui me semble une éternité, je pensais donc j'écrivais). Au début de ce confinement, je me suis dis "Chouette je vais de nouveau écrire !", mais écrire sur quoi quand ce virus occupe presque tout mon fil Twitter, presque toutes les pages des journaux et presque toutes les minutes d'antenne des chaines d'information en continue ? Écrire sur ce presque, ce petit espace d'autre chose disponible. Ce journal a-t-il une durée de vie limitée ? Est-ce un sas avant un retour vers ma première adresse ? J'ai attendu un mois avant de me relancer dans l'écriture, je peux encore attendre avant de chercher une réponse à ces questions.

Pour fêter ce retour une petite chanson :